Le point sur la stratégie

Positionnement du portefeuille pour une économie Trump 2.0

25 nov. 2024

Sur la question des thèmes d’investissement, la célèbre citation de Mark Twain me vient à l’esprit : « L’histoire ne se répète pas toujours, mais elle rime. »

Les investisseurs à la recherche d’un cadre pour contextualiser le résultat du scrutin aux États-Unis ont intérêt à garder cette maxime en tête. Après tout, les cycles électoraux de 2016 et de 2024 ne sont pas sans similitudes : Donald Trump a gagné et les républicains contrôlent désormais les deux chambres du Congrès. De plus, Trump a remporté l’élection en proposant essentiellement le même programme électoral qu’en 2016 (du moins, dans les grandes lignes) : protectionnisme commercial (notamment contre la Chine et le Mexique), réductions d’impôt, déréglementation et politiques anti-immigration.

Il est donc logique que les investisseurs prennent l’élection de 2016 comme point de départ pour tenter de prédire l’avenir. Dans cet article, nous allons tenter de mieux comprendre comment les marchés se sont comportés au début du mandat de Trump, en mettant le tout en contexte et en expliquant pourquoi la situation en 2025 risque d’être différente de celle de 2017.

L’économie réelle à l’époque

En 2017, l’année de l’accession au pouvoir de Trump, l’économie américaine a progressé de 5 % en taux nominal, et de 3 % en taux réel. En examinant d’un peu près ces chiffres impressionnants en soi, on constate que la hausse était en grande partie attribuable à la vigueur des dépenses du secteur privé. Par exemple, les ventes finales aux acheteurs intérieurs privés – qui ne tiennent compte que des dépenses des ménages et des entreprises – avaient augmenté de plus de 3 % cette année-là. Bref, la croissance était manifestement au rendez-vous.

Graphique 1 – PIB nominal et réel avant et après la victoire de Trump en 2016

Graphique 1 – PIB nominal et réel avant et après la victoire de Trump en 2016
Source : Bureau of Economic Analysis (BEA) des États-Unis. 

En gros, c’est une vague massive de dépenses du secteur privé qui avait alimenté la croissance aux États-Unis en 2017, en grande partie à cause des réductions d’impôts. N’oublions pas que la Tax Cuts and Jobs Act, qui prévoyait une forte baisse du taux d’imposition des sociétés (de 35 % à 21 %), était attendue avec impatience et a donné de l’élan aux dépenses non résidentielles. Jumelés aux efforts de déréglementation de Trump, les indicateurs de confiance avaient sans surprise monté en flèche cette année-là.

Graphique 2 – Croissance alimentée par la hausse des placements privés après les élections de 2016

Graphique 2 – Croissance alimentée par la hausse des placements privés après les élections de 2016
Source : BEA.

Du côté de la main-d’œuvre, le taux de chômage avait reculé de 0,6 point de pourcentage et plus de 2,1 millions d’emplois avaient été créés en 2017. L’inflation était demeurée proche de la cible de 2 % de la Réserve fédérale américaine (Fed) pendant la majeure partie de l’année.

Graphique 3 – Taux de chômage au début de chaque année (%)

Graphique 3 – Taux de chômage au début de chaque année (%)
Source : Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis.

En ce qui concerne les tarifs douaniers, ils sont vraiment passés à la vitesse supérieure en 2018. Cette année-là, Trump a instauré des tarifs sur les panneaux solaires, les laveuses, l’acier et l’aluminium. C’était aussi à peu près au même moment que la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine s’est nettement intensifiée. Le résultat net? Le déficit commercial des États-Unis est passé de 479 G$ US à la fin de 2016 à 559 G$ US à la fin de 2019. Alors non, contrairement aux attentes de Donald Trump, les tarifs douaniers n’ont pas réduit le déficit commercial.

Graphique 4 – Commerce de biens et de services américains au fil du temps (en milliards de dollars américains)

Graphique 4 – Commerce de biens et de services américains au fil du temps (en milliards de dollars américains)
Source : Census Bureau des États-Unis.

Comment les marchés se sont-ils comportés à l’époque?

Dans les six mois qui ont suivi les élections de 2016 :

  • L’indice S&P 500 a progressé de plus de 12 %.
  • Les services financiers (+19 %), les technologies de l’information (+18 %), la consommation discrétionnaire (+15 %) et l’industrie (+14 %) ont mené le bal. En revanche, le secteur de l’énergie a tiré de l’arrière (-2,3 %) au cours de cette période.
  • Les actions à petite capitalisation ont bondi de 16,5 %.
  • Les taux des obligations américaines à 2 ans ont augmenté de 32 points de base (PDB) pour s’établir à 1,33 %, tandis que ceux des obligations à 10 ans ont progressé de 53 PDB pour se fixer à 2,39 %.
  • Le dollar américain (USD) s’est apprécié d’un peu moins de 2 % sur une base pondérée en fonction des échanges, la majeure partie des gains étant par rapport au yen (JPY), au dollar australien (AUD) et au peso mexicain (MXN). Les prix de l’or ont reculé de plus de 3 %.

Depuis les récentes élections, nous observons des tendances similaires (voir le tableau 1). Sur le plan sectoriel, les exceptions notables sont les secteurs de la consommation discrétionnaire et de l’énergie, qui sont en meilleure posture aujourd’hui qu’en 2016. Et jusqu’à présent, la poussée des titres à petite capitalisation est relativement modeste par rapport à l’époque.

Tableau 1 – Comparaison des fluctuations du marché après les élections de 2016 et de 2024


S&P 500

Services fin.

TI

Cons. discrét.

Ind.

Énergie

$ US

Variation (PDB)
Taux oblig. amér. à 2 ans

Variation (PDB)
Taux oblig. amér. à 10 ans

Six mois après les élections de 2016

12,14 %

19,08 %

18,18 %

14,91 %

13,88 %

-2,26 %

1,23 %

47,64

53,21

Depuis les élections de 2024

3,74 %

6,95 %

3,59 %

8,21 %

4,95 %

4,44 %

2,91 %

10,29

16,46

Source : BMO Gestion mondiale d’actifs, au 14 novembre 2024.

En ce qui concerne le marché obligataire et des taux, c’est l’évolution des taux des obligations américaines à 10 ans qui nous intéresse. En effet, cette hausse était en grande partie le résultat des fluctuations des taux de rendement réels1 (qui ont augmenté de 40 PDB) plutôt que des taux d’équilibre 2 (en hausse de 13 PDB). Cela nous indique donc que le marché voyait d’un bon œil l’incidence des politiques de Trump (en particulier les réductions d’impôt) sur la croissance à long terme de l’économie américaine. Dans une certaine mesure, le marché est présentement du même avis (voir le tableau 2).

Tableau 2 – Comparaison des fluctuations des taux de rendement des obligations américaines à 10 ans

Change (bps)
Taux de rend. nominal, oblig. amér. à 10 ans

Taux de rend. réel, oblig. amér. à 10 ans

Taux d’équilibre, oblig. amér. à 10 ans

Six mois après les élections de 2016
53,21
39,90
13,18
Depuis les élections de 2024
16,46
5,03
11,90

Source : BMO Gestion mondiale d’actifs, au 14 novembre 2024.

En ce qui concerne le dollar américain, les marchés ont cette fois-ci bougé beaucoup plus vite pour intégrer les effets des tarifs douaniers. Autre fait intéressant, l’euro est aujourd’hui à la traîne de la plupart des grandes devises. Par ailleurs, le repli actuel des cours aurifères par rapport à 2016 est le signe d’une certaine offre excédentaire en raison de la reprise plus tôt cette année.

Que pouvons-nous conclure?

Si notre objectif était de reproduire le plan de match de 2016-2017, il nous suffirait de trouver les occasions dans le tableau 1 ci-dessus. Si la tendance se maintient en 2025, les services financiers, les technologies de l’information, les sociétés à petite capitalisation et l’industrie auront beaucoup de latitude pour croître. En revanche, des turbulences sont à prévoir du côté des taux américains, car le delta des taux obligataires à 2 ans et à 10 ans est encore bien en deçà des niveaux observés au cours des six mois ayant suivi les élections de 2016.

Nous sommes toutefois très réticents à l’idée de suivre à la lettre le plan de match de 2016-2017. En effet, il existe quelques différences notables entre le contexte de l’époque et celui d’aujourd’hui.

Premièrement, le cycle de la politique monétaire n’est pas au même stade. En novembre 2016, la Fed resserrait lentement sa politique monétaire après une période résolument expansionniste. Aujourd’hui, la Fed assouplit ses mesures très restrictives pour éviter une résurgence des pressions sur les prix, en grande partie en raison des capacités excédentaires moindres qu’en 2016

Ce dernier point mérite d’être étoffé. Aux États-Unis, c’est en 2017 que les étoiles se sont alignées pour ouvrir la voie au type de croissance non inflationniste dont rêve toute banque centrale. Cette embellie était en grande partie attribuable à la suffisance des capacités excédentaires. À titre d’exemple, le taux de chômage en novembre 2016 était d’environ 5 %, un niveau de loin supérieur à celui que nous associons aujourd’hui à la création de pressions inflationnistes par l’intermédiaire des salaires. Les offres d’emplois et le ratio d’utilisation à l’époque confirment également cette interprétation. Rétrospectivement, on constate que les politiques de Trump avaient toute la place nécessaire pour stimuler la croissance sans faire grimper l’inflation.

Le contexte n’est pas le même aujourd’hui. Le taux de chômage est supérieur aux creux cycliques, tout en demeurant bien en deçà du niveau observé à la fin de 2016. À tout le moins, cela indique que les pressions sur les prix sont aujourd’hui plus présentes qu’en 2026, ce qui pourrait obliger la Fed à poursuivre sa politique monétaire restrictive. Bref, nous ne pouvons pas compter sur le même contexte économique idéal qui a marqué une bonne partie de 2017.

Tableau 3 – Moins de capacités économiques excédentaires aujourd’hui qu’en 2016

Taux de chômage (%)
Offres d’emploi (en milliers)
Utilisation de la capacité (%)

Aujourd’hui

4,10
7443
77,50
Élections de 2016

4,90

5868
75,50

Source : BMO Gestion mondiale d’actifs, au 31 octobre 2024.

Deuxièmement, les États-Unis enregistrent déjà de lourds déficits. En pourcentage du produit intérieur brut (PIB), le déficit budgétaire était de 3 % lorsque Donald Trump est arrivé au pouvoir en 2016, alors qu’il frôle 6 % aujourd’hui. De plus, la répartition de la dette est en situation de déséquilibre, le gouvernement (en pourcentage du PIB) en détenant plus que le secteur privé. Il est donc plus important que jamais de déterminer avec exactitude comment les déficits seront financés à l’avenir, ce qui pourrait éventuellement se répercuter sur lois relatives aux réductions d’impôt pour les sociétés.

Graphique 5 – Répartition de la dette en pourcentage du PIB (%)

Graphique 5 – Répartition de la dette en pourcentage du PIB (%)
Source : Réserve fédérale.


Ces deux différences nous indiquent que toute hausse de la croissance alimentée par les politiques de Trump aura sans doute un effet inflationniste aujourd’hui. Les marchés ont profité d’une croissance non inflationniste en 2016, mais la marge de manœuvre est actuellement plus restreinte. Les taux de rendement devraient donc rester élevés sous l’effet d’un cycle d’assouplissement de la Fed plus modeste et de l’accentuation de la prime de risque-inflation. Cette situation devrait refroidir l’enthousiasme des secteurs souvent sensibles aux taux, comme la consommation discrétionnaire, les technologies de l’information et l’industrie.

De plus, même s’il y a fort à parier que le dollar américain continuera de s’apprécier à court terme, n’oublions pas que les thèmes politiques (plus particulièrement la hausse des tarifs douaniers) ont tendance à se refléter beaucoup plus rapidement sur le marché des changes. S’il est vrai que rien ne semble indiquer que les importants déficits budgétaires persistants affectent présentement le dollar américain, ce qui s’est passé au Royaume-Uni à la fin de 2022 nous rappelle que les marchés peuvent condamner une politique budgétaire irresponsable. Le mouvement à la baisse des prix de l’or au cours des prochains mois (sous l’effet de la vigueur du dollar américain) est donc loin d’être assuré.

Cela dit, certaines tendances se confirment. Par exemple, les actions à grande capitalisation continueront sans doute de bien se comporter, avec les services financiers en tête de peloton. En effet, les services financiers ont tendance à être moins sensibles aux fluctuations des taux que d’autres secteurs, ce qui nous rassure sur le potentiel d’instruments comme le FINB BMO équipondéré banques américaines (symbole : ZBK).

De plus, il y a des raisons de croire que la reprise des cryptomonnaies se poursuivra. Nos lecteurs réguliers savent qu’il y a un lien entre des déficits publics sans contraintes, le bilan des banques centrales et l’évolution du bitcoin. Mais nous préférons ne pas nous lancer à fond, optant plutôt pour des fonds exposés aux cryptomonnaies qui offrent tout de même une certaine diversification. De ce point de vue, il est logique de se tourner vers le fonds ARK Fonds innovation BMO, série FNB (symbole : ARKK).

En ce qui concerne l’élargissement de l’exposition, nous sommes toujours satisfaits du FINB BMO MSCI américaines de haute qualité (symbole : ZUQ). En ce qui concerne les facteurs, la qualité était en tête lors des six premiers mois ayant suivi les élections de 2016, et nous ne voyons pas pourquoi ce scénario ne se reproduirait pas aujourd’hui. De plus, notre FNB de stratégie à positions acheteur et vendeur axé sur les États-Unis, le FNB BMO d’actions américaines à positions acheteur et vendeur (symbole : ZLSU), a enregistré un assez bon rendement depuis l’élection, et nous chercherons aussi à étoffer l’exposition de ce côté. 

1 Taux de rendement réel : Le taux de rendement qu’un investisseur reçoit sur un placement, compte tenu de l’effet de l’inflation sur son pouvoir d’achat.

2 Taux d’équilibre : La différence de rendement entre deux titres portant intérêt de même échéance et présentant le même risque de crédit (habituellement des obligations). Cet écart calculé en point de pourcentage peut être utilisé pour estimer les tendances de l’inflation et déterminer le taux de rendement minimal nécessaire pour préserver le patrimoine.

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